Le portrait photo comme début d'un échange |
Dans le Rwanda d’aujourd’hui, il est très difficile de parler ouvertement de certains sujets. Se référer à tout type d’appartenance ethnique peut conduire à la prison, comme critiquer les politiques de développement du gouvernement. A cela s’ajoute une certaine pudeur rwandaise à exprimer publiquement sa propre opinion. C'est pour cette raison que le projet a privilégié le portrait individuel à l'abri des regards. Un concept photographique bien précis a été utilisé comme moyen de rapprochement avec les témoins pour faciliter des échanges plus vivants, plus intimes et pour mettre en avant la personne et son histoire, quelle que soit son appartenance ethnique ou sociale. Le « Polaroid » et photo « unique », a été possible grâce à un appareil photo de 1937 (Speed Graphic + objectif Aero Ektar + pellicule Fuji) qui permet le développement immédiat du cliché. Deux photos ont été prises de chaque personnage : la première a été offerte à la personne photographiée et la deuxième, est intégrée à ce projet. Le cliché pris par Arno Lafontaine, artiste et photographe, devient le cœur de l’échange humain. |
André |
André Mukwiye, 45 ans, Tutsi né en exil au Burundi. En 1990, il s’engage dans l’armée des Tutsis en exil (FPR) qui en 1994 a mis fin au génocide et a pris le pouvoir. Grâce à l’aide de l’État, il a pu s’acheter autour du village des terres qu’il loue à des paysans. André fait partie des « retournés », les Tutsis nés à l’étranger, qui ont reçu de la terre et parfois ne sont pas bien vus même par les rescapés. |
Alphonsine |
Alphonsine, 49 ans, a été accusée de pillage pendant le génocide et son mari a passé 15 ans en prison pour meurtre. Acquittée lors des tribunaux « gacaca », elle vit dans une grande pauvreté et il lui est extrêmement difficile de nourrir ses enfants et petits-enfants. Elle a emprunté de l’argent, mais n’arrive pas à le rembourser. Alphonsine représente la paysanne rwandaise appauvrie par les conséquences du génocide . Elle essaie d’améliorer sa situation malgré un mari sans emploi. |
Jeanne |
Jeanne, 32 ans, rescapée avec deux jeunes enfants. Malgré le traumatisme causé par le massacre de sa famille, elle se débrouille mieux que d’autres rescapés. Elle reçoit l’aide de l’Etat et grâce à son réseau les autorités ferment les yeux sur son commerce illégal d’alcool. Jeanne représente la génération de rescapés qui étaient jeunes au moment du génocide et qui ont construit leur vie sans famille. |